dimanche 21 octobre 2012

Ironie n°153 - Février 2011 : Marcelin Pleynet


Ironie     Ironie     Ironie
Interrogation Critique et Ludique n°153 – Février 2011
http://ironie.free.fr – ISSN 1285-8544
IRONIE : 51, rue Boussingault - 75013 Paris


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MARCELIN PLEYNET



Jeudi 17 février 2011, à 19 heures
Musée d’Art moderne de la ville de Paris, salle Matisse


À l’occasion de la parution de son livre
 Comme la poésie la peinture (Éditions du Sandre – Éditions Marciana, 2010),
Marcelin Pleynet s’entretiendra avec Fabrice Hergott,
directeur du Musée d’Art moderne de la ville de Paris.

Cet entretien sera précédé d’une lecture

par Florence D. Lambert et Lionel Dax,
et suivi d’une signature à la librairie du musée. 

Entrée libre 

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MATISSE, UNE SECONDE VIE
 
François Legrand : Comment qualifier l’expérience biographique de Matisse pendant et après la maladie ? 

Marcelin Pleynet : Je dirais d’abord qu’avec Picasso, Matisse est pour moi un des deux plus grands peintres du XXe siècle. Matisse est incontestablement le plus grand peintre français depuis Cézanne, Cézanne à qui il rend hommage à plusieurs reprises dans son œuvre. Après son opération réussie à Lyon en 1941, Matisse est le contraire d’un artiste replié sur lui- même, son œuvre plus que jamais se déplie sur le monde. Il y a alors chez Matisse un retrait pour une ouverture. Avec cette particularité qui le distingue de Picasso : son traitement délibéré du nihilisme par la négation – la négation de la négation. D’où l’importance de la maladie dans l’œuvre et la réponse absolument splendide qui est donnée à l’arrivée de la négativité dans le corps de l’artiste. Cette maladie est vécue comme la maladie du siècle. Il y a une très belle phrase de Nietzsche là-dessus : « Partant du point de vue du malade, considérer les notions et les valeurs les plus saines. » C’est valable pour la pensée historique de Matisse, et, à partir de 1941 plus particulièrement, pour la façon dont il pense et dont il traite son corps. En conséquence, Matisse vit à Nice, la ville qu’il a adoptée pour sa lumière, et à Nice auprès de Madame Lydia Delectorskaya, qui est une femme fabuleusement belle qui a joué un rôle important dans la vie, c’est-à-dire dans l’œuvre du peintre. 

F. L. : Comment Matisse traverse-t-il les « années noires » ? 

M. P. : Je dirais que Matisse possède une vision philosophique du monde à l’intérieur duquel il se trouve. Cet homme a traversé deux guerres mondiales, et, alors que sa femme et sa fille sont aux mains des Nazis, il décide de dire ce qu’il en est pour un homme de vivre dans un monde habitable, alors que le monde dans lequel il vit est aussi inhabitable qu’inhabité. C’est l’essence même de l’œuvre de Matisse, encore plus marquée, je crois, dans la seconde partie de son œuvre et tout au long de la guerre. Parlant des artistes français qui se sont rendus en Allemagne, Matisse écrit : « Je les trouve très courageux »... C’est amplement suffisant. Matisse a une conscience aiguë du caractère destructeur du nihilisme qui hante son siècle. Résistant à cela, il fait une œuvre de résistant. Son œuvre célèbre d’abord et essentiellement dans l’homme tout ce qui aspire à une habitation heureuse, à une joie de vivre. L’œuvre de Matisse est une réponse constante au siècle. Matisse revendique ce qu’il en est de la jouissance et la vérité d’un homme comme modèle contre ce qui fait sa destruction. L’art de Matisse, au-delà de la crise de la métaphysique qui empoisonne le siècle, fait, dès sa rencontre avec les pastels de Quentin de La Tour, explicitement signe au XVIIIe siècle français. Et c’est dans cette perspective qu’à la fin de sa vie, sans la moindre trace de puritanisme, il associera érotisme et catholicisme. 

F. L. : L’habileté politique de Matisse après guerre tient-elle de l’art de l’acrobate?

M. P. : Sur ce plan, on peut parler d’une stratégie concertée et très fine de Matisse. Le rapport à Aragon en fait partie : il ouvre son œuvre à un public (la gauche française et plus particulièrement la gauche communiste) qui n’était pas vraiment matissien. Ainsi ce sera Picasso, célébré lors du fameux Salon de la Libération de 1944, qui y fera inviter Matisse. On manque par ailleurs d’informations sur la très curieuse attitude de Madame Delectorskaya qui donnait à l’Union soviétique les tableaux que Matisse lui offrait – il n’est pas exclu qu’elle soit alors conseillée directement par Matisse sur ce point. De même, quand Matisse est invité, en 1950, à exposer à la Maison de la pensée française – d’obédience communiste –, que choisit-il d’exposer ? Les œuvres liées à la chapelle de Vence ! Donc, dans l’immédiat après-guerre, on discerne deux grands moments stratégiques de Matisse par rapport à son œuvre, d’une part les rapports avec le PCF à travers Aragon et d’autre part les rapports avec Rome à travers la chapelle. On peut noter qu’au même moment Picasso, qui a pris la carte du PCF, choisit pourtant de ne pas faire revenir Guernica de New York. Ces deux artistes partagent donc une intelligence tout à fait extraordinaire de leur art, qui ne les isole pas de la société dans laquelle ils vivent, mais qu’ils appréhendent en fonction des limites mêmes de cette société. Matisse a été très marqué par le fait que, en 1913, le puritanisme entraîne les Américains à brûler en effigie le Nu bleu, souvenir de Biskra lors de la présentation de l’Armory Show à Chicago. 

F. L. : Peut-on comparer l’effusion chromatique de la Nature morte aux magnolias, peinte en 1941, et des Intérieurs de Vence à un néo-fauvisme ? 

M. P. : Il n’y a pas de néo chez Matisse. N’oubliez pas l’importance pour son œuvre de son tour du monde et du séjour à Tahiti en 1930. Il se rend à Tahiti pour, comme il le dit, découvrir la vérité singulière de la lumière du Sud de la France. Confrontant sa sensibilité et son savoir à l’étrangeté des Tropiques, il renforce la singularité de sa vision afin de mieux connaître l’essence de la lumière et de l’art français. Ce qui se produit après ce grand voyage, après avoir traversé la lumière que Gauguin a connue, ce n’est donc pas un quelconque néo-fauvisme, c’est l’irruption d’une lumière qui n’est française que parce qu’elle est matissienne. Quand, d’autre part, Matisse parle de peindre avec des briques, ne s’emploie-t-il pas alors à mettre en évidence l’importance qu’il attache aux dispositions du volume de son œuvre ? Dans les années 40 et 50, Matisse a sans doute réagi consciemment à cette idéologie de la surface en provenance des États-Unis. Je suis convaincu que pour Picasso et Matisse, la seconde partie de la carrière est entièrement déterminée par ce qui à juste titre leur semble être passé inaperçu dans les études qui leur furent consacrées. Ils savent déjà l’un et l’autre la place qu’ils occupent dans l’histoire – aux côtés de Giotto, de Titien, de Michel-Ange, de Vélasquez, Manet, Cézanne... La seconde partie de leur carrière consiste à préciser très rigoureusement ce qu’il en est de leur œuvre, de ce que très singulièrement elle manifeste, de ce qu’elle dévoile et que la critique s’emploie aujourd’hui encore à recouvrir et à détourner. Picasso va revenir déclarativement sur un certain nombre de tableaux de l’histoire de l’art de Vélasquez à Manet et sur les déterminations érotiques de l’ensemble de son œuvre avec la suite Raphaël et la Fornarina... Matisse, lui, choisit d’inscrire l’ordre de ses sensations dans une tradition qui a 2000 ans, avec la chapelle de Vence, et par la même occasion de sortir son œuvre d’interprétations trop strictement formelles. Par ailleurs, avec les gouaches découpées, Matisse ne déjoue-t-il pas la disposition frontale des peintures en créant un espace à au moins trois dimensions ? La troisième dimension, c’est le tour du monde et la perception de son œuvre comme perception existentielle d’un univers. 

F. L. : C’est une vision pour le moins inusitée en France ? 

M. P. : C’est l’idéalisme et le puritanisme du formalisme américain qui ont universitairement prévalu en France. Mais si vous voulez faire exploser ces textes, confrontez-les à la question de la figure féminine et de l’érotisme. Tout explose ! L’ultime phrase d’Une saison en enfer de Rimbaud éclaire l’intelligence sensible de Matisse : « Et il me sera loisible de posséder la vérité dans une âme et un corps. » Ce corps manque incontestablement à nombre d’exégètes de Matisse. Cette vision « plate » de Matisse est d’ailleurs plus ou moins entretenue par la famille Matisse, elle-même terrorisée à l’idée que ce très grand artiste ait pu avoir un corps... Matisse n’ignore jamais qu’il a un corps, et que ce corps, il lui faut aussi le traverser. 

F. L. : Pourquoi Matisse considérait-il Jazz comme un échec ? 

M. P. : Jazz est un malentendu de succès public comme en témoigne la récente et il faut bien le dire malheureuse exposition du musée du Luxembourg. Le livre n’est pas vivant, il n’est pas à la bonne échelle et donc il n’est pas musical. Toutefois avec Jazz, Matisse forme un volume – un livre est un volume – et donc cela a trois dimensions. On retiendra aussi à cette occasion que l’œuvre de Matisse est pleine de jeux de mots formels : ainsi, par exemple, avec ses odalisques qui jouent à un jeu de dames... Chez Matisse, comme chez les très grands peintres, la forme et le nom de la forme sont une même chose. Or si on doit reconnaître à Jazz une influence, c’est d’abord en ce que l’œuvre se présente comme un volume, c’est que très généralement l’œuvre entend faire musicalement volume.
Des artistes de cette envergure, avec l’œuvre qu’ils ont derrière eux, ne font rien sans arrière- pensée.
En 1942, Matisse a traversé la mort. Jusque-là, sa grande phobie était de devenir aveugle. Après son opération – il a été ouvert, on l’a découpé –, c’est un homme qui est passé à travers, de l’autre côté, mais qui, bien entendu, ne passe pas seul, il passe avec son œuvre. 

(...)

Marcelin Pleynet Extrait de Comme la poésie la peinture, Éditions du Sandre / Éditions Marciana, 2010.

Ironie n°153 - Février 2011 : Julien Magre

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Interrogation Critique et Ludique n°153 –  Février 2011
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Sonder l’intime

 
Ponctions du dévoilement. Théorie de l’oignon, pelure après pelure, l’espace se découvre par bribes, par indices. Le voyant est projeté à l’intérieur et le plan, le choix du détail, le renvoie vers l’extérieur. Le regard à la frontière. L’appareil photographique est une sonde envoyée sur Vénus... Après la mère, la vie comme une sieste. Indices indécis du réel, les instants saisis de l’histoire de Caroline par Julien Magre porte à la fois le voile de la pudeur et le désir de l’effraction érotique. Les chambres, les poses, les jeux, les vacances, tenir le temps dans ses mains, appareil en prise surprise : tout mène à faire un album en marge de la vie vécue qui ouvre à une narration. D’autres histoires à inventer. Déclic, point de départ... Joie assumée, montrée et voilée, comme cette lettre volée épinglée sur le papier peint la première chambre. Chambre claire de l’amour. Il s’agit donc de trouver des légendes comme des titres de nouvelles qu’il resterait à écrire, de jouer avec les situations, d’interpréter les gestes entre aperçus.


2000-2003
Lit d’automne – Spirales des souvenirs – Le temps en vrac – Ombre d’elle – Chambre rouge – jouissance masquée du temps – Le rose est sans pourquoi – Jambes à l’air – Les herbes folles – Baptême d’une baigneuse – Lieux interdits – Annonciation – Un nouveau corps – Lettre volée de l’amant – Effraction de la lumière – Les reflets du serment – Caroline du sud – Théâtre de la sieste – Torsion flottante – Anniversaire – La piste du soleil – Réveil aux stores – Musique du sommeil – L’attente vibrante – Femme à l’enfant.
2004-2006
Horizon Méditerranée – Le bonheur du bain – Soudain, la pluie – L’ange du troisième millénaire – La forêt de l’enfance – Je suis grande – Le vent mauvais – L’albatros rouge – Le chemin des bois – Le masque de l’imaginaire – Vol blanc – Cascade – Cyprès, si loin – Robe Maman – Déguiser, démaquiller – Devine – Bouge pas – Palmiers sauvages – Feu d’artifice – Voir défiler – Les diamants de la mer – Le cauchemar de la ceinture – Deux fleurs – MoNoM – L’enfant à l’édredon – On n’y va – Le ciel effeuillé – Don de Dieu.

2007-2010
Deuxième vie – Les culs nus – Bébé jungle – Je suis là – Mi ange Mi dé- mon – Au milieu d’une forêt obscure – L’œil de mon ventre – Les secrets sucrés – Lit de mousses – Remous – Plongée dans le vert vallon – Flâner.


Oui je le veux bien oui. Photographier, c’est sonder l’intime.
Lionel Dax – Eté 2010
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Julien Magre ou la Vie Tendre

  


Une poétique du quotidien
Julien Magre nous donne à voir une parcelle de sa vie, celle qu’il construit et reconstruit à travers son objectif photographique. En photographiant sa compagne Caroline et ses filles Suzanne et Louise, il documente son quotidien, et par là même le rend poétique. Les photographies sont des moments de vie, volés au temps, volés à l’instant d’une vie qui se disperse. Il en reste des bribes, des morceaux de tendresse, le cadre d’un sourire ou d’un regard.
Ces moments captés donnent des images qui sont bien souvent la traduction d’un instant d’entre-deux ou d’hiatus. En effet, beaucoup de ces images travaillent le lieu du basculement entre la veille et le sommeil, ce moment où les corps se relâchent et s’oublient.
C’est alors que le père ou l’amant — en veilleur attentif — décide d’appuyer sur le déclencheur : des corps allongés, endormis ou pensifs, des corps nus ou débraillés qui se donnent dans leur simplicité de vie, des bribes de corps aussi, qui, tous se laissent capter dans des draps défaits. La poésie réside dans ces moments éphémères qu’il faut parvenir à traduire. Il s’agit aussi de mettre en scène cet incommensurable instant qui est celui de l’enfance: les enfants vont grandir, leur blondeur se transformera, mais les images vont finalement perdurer. Il y a ici une enfance en acte, en jeu, dans des regards ou des sourires. Cependant, il ne faudrait pas se tromper sur la nature de ces images et croire à un simple album de famille dans lequel la photographie serait comme un passage obligé et fondamentalement social. En réalité, Magre déjoue les codes de l’album de famille au sens sociologique que lui donne la thèse de Pierre Bourdieu dans Un Art moyen puisque c’est dans son ensemble que la série prend sens: c’est entre les images que du temps se glisse, c’est entre les images que la tendresse s’universalise. Il n’y a pas d’anecdote, mais bien plus la construction et le montage lacunaire dune vie.
Dans cette vie documentée, une figure féminine est omniprésente, celle de Caroline, la femme qui donne son nom à cette série. Ce qui étonne c’est qu’elle apparaît à la fois avec sérieux et bienveillance : qu’elle regarde droit dans l’objectif ou qu’elle se détourne, qu’elle apparaisse dans un miroir ou complètement bord cadre, elle reste silencieuse. Elle semble vouloir garder cachée une intimité qu’elle finira par dévoiler malgré elle. Elle est actrice de sa propre vie. Elle est là, physiquement, et irradie toutes les images de sa présence absolument irréductible. Ces images sont une déclaration d’amour à ce visage aimé.




Un autoportrait de vie?
En regardant les images, comment ne pas penser au photographe? Cet homme qui fait le portrait de sa vie — son autoportrait au sens fort du terme — mais qui pour autant n’apparaît nulle part directement. Un autoportrait sans visage, voilà ce que le photographe donne ici à voir. Mais c’est peut-être plus complexe que cela: l’autoportrait serait à chercher dans ce miroir qu’il tend à sa propre vie, ce miroir qu’il promène dans son quotidien. L’autoportrait c’est ici un autoportrait du regard: le photographe apparaît dans le regard de cette famille qui, finalement, lui renvoie la plus sincère et intime représentation.
Julien Magre photographie sa vie, cartographie son quotidien et les instants qu’il passe avec sa famille, tout en réinventant cette vie. Ces images sont autobiographiques certes, mais on pourrait dire que le fait même de photographier sa vie revient à la mettre en fiction, à l’élargir. C’est comme si la vie était amplifiée, c’est-à-dire rendue plus intense et plus riche par l’intervention du medium photographique. Cette amplification, c’est la mise en littérature de sa propre vie, la fictionnalisation d’instants arrachés à la banalité. En photographiant sa vie, Magre lui donne une multiplicité de sens, il l’ouvre sur des possibles, et sur l’imaginaire.
Les images nous introduisent avec tendresse dans une vie rêvée.

Léa Bismuth, critique d’art, novembre 2010


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Caroline Histoire Numéro Deux
Julien Magre
Filigrane Editions – 2010

Site de Julien Magre : www.julmagre.com
Dans le cadre de l'EXPOSITION "Cinq étranges albums de famille" au BAL,
6 photos tirées du livre "Caroline, histoire n°2" sont exposées au BAL café, du 14 janvier au 17 avril 2011.
Le livre est disponible également à la librairie du BAL / LE BAL - 6 impasse de la Défense - 75018 Paris

« Julien Magre a commencé à photographier sa femme, Caroline, en 2000 puis ses deux enfants, Louise, à partir de 2004, et Suzanne, depuis 2007. Chronologique, le livre se lit comme un album de famille.
Son univers mêle l’extraordinaire à l’ordinaire sans conflit, avec une douceur mélancolique... un peu comme si chaque arrêt sur image pouvait nous donner, paradoxalement, le sentiment intime et perturbant du temps qui fuit... Ses photos ne capturent rien, n'emprisonnent rien, ne figent rien : elles libèrent simplement l’instant de toute attente esthétique, stylistique, et même presque, photographique, pour simplement le laisser exister dans un cadre qui est celui du regard. »
Violaine Bellet


Ironie n°154 - Mars 2011

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Ironie       Ironie      Ironie
Interrogation Critique et Ludique n°154 –  Mars 2011
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 Sexy Sexa Vita Nova
La belle soixantaine !


Picasso, Mousquetaire et Amour, 1969

On met longtemps à devenir jeune

Lizbeth Rocher a interrogé une soixantaine d’hommes et de femmes ayant comme elle passé avec panache le cap des Soixantièmes Rugissants. Elle a fondé son analyse sur des entretiens mêlant célébrités et anonymes, amis et rencontres de hasard, commandant de police antiterroriste et anarchistes, babas et bobos, artistes et intellectuels reconnus ou précaires, marginaux ou embourgeoisés, commerçants du quartier ou forains… les propos des gens ordinaires se révélant parfois extraordinaires… Ce qui s’esquisse ici, voire s’affirme résolument, est un art de savoir vieillir, que nos chers « sexy sexas » découvrent avec ingéniosité…

Qu’advient-il de la vie des sens en l’automne d’une existence que nous voudrions encore et encore jonchée de printemps ? Quand devient-on vieux ? On parle de la génération « quadra » ou « quinqua ». Mais qu’en est-il au juste des « sexas » — treize millions en France — au regard des trois centres d’intérêt et d’interrogation autour desquels j’ai choisi de sérier mon enquête : la séduction, le désir et l’amour ? Qu’en est-il dans le cœur et le corps des sexagénaires ?
Que devient l’art de plaire pour ceux qui  auraient, selon certains, outrepassé le temps des ardeurs du corps et des audaces effrénées ? Comment ledit « troisième âge » se perçoit-il dans le miroir souvent cruel que lui tend la société ? Les femmes sont-elles, à ce jeu-là, plus vulnérables que les hommes ? Comment les sexas se vivent-ils aujourd’hui, au gré des douceurs et des douleurs de l’amour, en regard de ce qu’ils étaient hier ? Qu’est-ce qui change et se maintient en eux et autour d’eux ? Quels tabous voudraient-ils abolir ? Que peuvent se permettre les baby-boomers de différent ou de nouveau par rapport à la génération de leurs parents ?
(Extrait de l’avant-propos de Vita Nova —la belle soixantaine !—, ouvrage à paraître de Lizbeth Rocher)

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Florilège

Amitié

Michèle M., journaliste, correctrice, choriste
Je n’ai jamais fait de hiérarchie entre l’amour et l’amitié. Plus que jamais j’élève l’amitié au rang d’une passion !

Britt Nini,  documentaliste, critique de cinéma
« Salut Camarade ! » disions-nous dans les années 70 : un temps où nous n’avions ni amis ni copains, mais seulement des « camarades »… Une manière de faire entrer « le Politique » jusque dans nos draps !  

Danièle T., violoncelliste, militante féministe Babayaga
Amitié rime pour moi avec solidarité féminine, militance, révolution permanente ! J’aime l’idée folle de ces femmes de Montreuil qui refusent le naufrage de la vieillesse, inventent une nouvelle façon de vieillir ensemble, ludique, sociale, engagée. Pas mal d’entre elles ont soigné leurs hommes, élevé leurs enfants et choisissent désormais de poursuivre la route entre elles. Il arrive que l’amitié devienne amoureuse… 

Charles G., distributeur de cinéma
L’amitié ? Tu veux une anecdote un peu borderline ? Un soir au Mexique, Buñuel me raconte : 
« Chaque jour, Federico Garcia Lorca harcelait Salvador Dali :
— Alors quand ? Quand ?!
Dali de répondre : 
— Ah non, la sodomie pas pour moi ! 
 Jusqu’au jour où Garcia éclate : 
—Ecoute Salvador, si je ne te baise pas, on n’est plus copains.
Là, enfin, Dali craque : 
—Bon, écoute Federico, je ne veux pas perdre ton amitié, alors on y va ! 
 Au plumard, Dali se met à poil, Lorca l’encule. ­
—Aïe, aïe, aïe ! Que dolor, que dolor ! Hombre, pàrate, arrête ça, tout de suite !
Et Dali d’ajouter :
—Ecoute,  je préfère te perdre comme ami que d’avoir mal au cul ! 
Lorca de stopper net. Dali avait été jusqu’au bout, tout était réglo. L’amitié était sauve.
(NDLR : une amitié très profonde !)

Amour libre, mariage, solitude

Maxime L., chanteur-compositeur célèbre
Le prince charmant n’existe pas ! Aucun homme ne peut jouer ce rôle sans être démasqué !

Michèle M.,  journaliste, correctrice, choriste
Revivre en couple si je redevenais célibataire ? Hum… Je choisirais plutôt un mode de vie  individualo-communautaire, un phalanstère à la Charles Fourier. Génial, d’ailleurs, le phalanstère, pour plus tard, plutôt que la maison de retraite médicalisée !

Laurent D., artiste peintre
J’ai tout vécu : les périodes en ménage avec des compagnes successives, les plages de solitude. Je suis à nouveau en couple, tant mieux car je ne sais pas vivre seul, je déteste ! Je crois que les femmes ont moins de mal que nous, d’ailleurs, avec cette histoire de solitude. C’est propre aux mecs, non ?

Mimi M., assistante dentaire, mère au foyer, puis divorcée
C’est un peu tard que j’ai compris que le divorce faisait partie du  kit-mariage ! T’es lâchée à 60 balais pour une jeunette,  au moment où tu es très fragile, et cela sans explication, sans façon, sans un rond. Cadeau de l’âge, merci Christian, classe ! Je me retrouve seule, mais étrangement beaucoup moins abattue que je l’aurais cru. Plus d’horaires, oubliées les corvées, retour aux copines, à l’Amitié grand A !


Sylvie P., libraire spécialisée 
J’ai vécu l’amour libre plusieurs fois, mais depuis quelques bonnes années, j’ai fait mon choix. J’aime trop la liberté et les gens en général pour vivre avec quelqu’un en particulier.  

Fatima C., traductrice, interprète
Le mot « couple », pour moi, c’est le vieux monde ! L’idéal, c’est le duo qui n’enchaîne pas, où chaque partenaire demeure un individu aussi libre et ouvert qu’aimant et généreux !

Yves F., ancien député Vert, écrivain multipolaire
Moi je viens des communautés du Larzac, des Cévennes. J’ai expérimenté toutes les formules avec des femmes différentes, des libres, des moins libres, mais un jour ou l’autre, ça craque. Faire rimer amour et liberté, complicité et libertinage, tendresse et légèreté, c’est pas facile mais j’y ai toujours cru, j’y crois encore, on peut y arriver !

Aravni M., régisseuse, puis assistante sociale.
Je suis célibattante et ça me va.  Je ne suis pas très douée pour la vie à deux et je n’ai pas dû faire les bonnes rencontres… Je me méfie de moi, de trop donner, de me laisser envahir, donc je reste à l’écart ! Je pense toutefois que je saurais mieux me préserver aujourd’hui, que je ne me ferais plus « manger » quoi… Où ai-je lu récemment que la courbe du bonheur atteindrait son zénith entre soixante et soixante-dix ans ? Dans Le Monde, je crois ?     

Pascal B., philosophe, essayiste, romancier
Le couple ? Il va tellement bien que c’est au nom de l’amour que tant de couples se séparent et se persécutent ! Des conduites à répétition ! On a un peu honte de répéter invariablement le même scénario, mais on recommence !... 
Le couple fusionnel ? S’il y a fusion des amants, il y a aussi risque de désagrégation… 

Dominique R., photoreporter(e)
L’amour fusionnel, j’en ai toujours rêvé, et le rêve empêche de le vivre ! 

Aventure(s)

Noël G., entarteur, critique littéraire et de cinéma
Tant que les drôlesses tournicotent autour de mon « couple pivot » comme en mai 68, je suis rassuré ! Et je suis un fichu-pourri-gâté côté « aventurettes » d’être accosté ainsi tous les jours en France,  Suisse, Belgique, au Canada et jusqu’au Japon par des inconnues de tous âges qui me félicitent pour mes tartes ! Il arrive qu’elles m’offrent à boire, m’amènent chez elles… Et là le rhum, l’aphrodisiaque Zottegem (la bière qui rend « zot », dingo  en flamand) et le sexe à la clé ! Bref, l’enchantement absolu, totalement inattendu… (NDLR : une tarte, hop, deux nanas !)

Pierre A., comédien de premier plan
Plus besoin d’aventure : j’ai la chance de vivre avec une femme qui est à la fois ma maîtresse, mon  amie, mon compagnon de jeux, mon amour, mon enfant !

Lucien C., gynécologue, sexologue
J’ai aussi rencontré des hommes monogames… (NDLR : il rit) Mais oui, ça existe ! Ils sont heureux ou malheureux, mais ils ne pensent pas du tout à une autre femme que la leur…

Dominique R., photoreporter(e)
Le tourisme sexuel ? Hou la,  pas pour moi ! Je suis très puritaine sur le sujet. Je ne suis pas allée voir le film avec Charlotte Rampling s’y adonnant, par exemple, et  Dieu sait si je suis sensible à son charme ! Quant à l’échangisme, n’en parlons pas ! Ou le sadomasochisme, l’horreur absolue ! Je suis désespérément normale et j’assume !... Mais à la soixantaine attention, on se sent plus que jamais à la merci d’une crise de romantisme ! On se dit : Et pourquoi refuserais-je de m’embarquer dans une nouvelle aventure amoureuse, c’est si agréable… Et puis on se réveille : Hé ho là, où je vais, là ? Car au bout du compte, ce n’est pas agréable, ça cogne !

Leila A.,  gardienne d’immeuble
Je suis plutôt du genre « veuve joyeuse » ! Me reprendre un mari ? Non merci, j’ai donné ! Des petits « extras », ça et là, par contre… Mais des vrais amoureux, hein, pas des escort boys ! J’ai mes « visiteurs du soir », ça égaye ma loge…

Nabil T., dermatologue spécialisé cosmétique
L’amoureux au quotidien, je l’attends, je l’espère toujours ! Je suis toujours au point mort, mais le bonheur de rajeunir les visages de mes patients est un orgasme chaque jour renouvelé. Il est arrivé une fois que l’aventure pointe son nez, au bout de mes doigts… experts, al hamdullilah !

Charles G., distributeur de cinéma
Il n’y a que deux sexes, on n’a qu’une vie, quel manque de curiosité de ne pas tout essayer ! Je suis pour toutes les expériences, au moins une fois !... « Surprise ! » me lance un jour Henri Langlois à propos de l’invité que je devais aller chercher à l’aéroport. C’était Orson Welles ! Nous dînons ensemble. Ne voilà-t-il pas, au dessert, que Monsieur Welles en personne me pince sous la table (j’étais très mignon) ? Une drague d’une beauté ! Orson, 140 kilos ; Langlois, 130 ! Que faire ? Allais-je me faire niquer par Orson Welles ? Je savais qu’un  jour ou l’autre il faudrait bien y passer ; néanmoins, ce soir-là, je me débinai. Plus tard, par contre, avec mon ténor… 

Baiser moins ?

Pascal B., philosophe, essayiste, romancier
On s’obsède avec le sexe comme avec le bonheur. Comme si l’on pouvait commander l’un ou l’autre à  la carte ! Oui, je crois désormais qu’il faut se libérer de l’idéologie de l’émancipation obligatoire héritée de 68.  En ce sens, je suis en rupture de la rupture, ce qui ne veut pas dire que je renonce à quoi que ce soit, charnellement s’entend !
Quand on arrive à une sexualité épanouie, ce n’est déjà pas si mal… Mais l’injonction au sexe est devenue telle que dans les périodes basses nous souffrons davantage d’avoir l’air moins « verts » aux yeux des autres que de la baisse de sexualité elle-même…

Fatima C., traductrice, interprète
Ce qui compte, c’est ce qu’on vit, bien sûr, qu’importe le « qu’en dira-t-on » ! C’est d’ailleurs un des privilèges  de l’âge de devenir de plus en plus indifférent au jugement des autres… 

Jacques D., secrétaire de rédaction, enseignant à Troyes, puis créateur du C.E.C.
Plus besoin d’avoir l’air de bêtes de sexe  déchaînées et consuméristes pour prouver quoi que ce soit. D’ailleurs, je me sens plus serein maintenant qu’au temps des performances quantitatives ! 

Mimi M., assistante dentaire, mère au foyer,  puis divorcée
Il y a un an que mon mari est parti avec une Marocaine de l’âge de notre fille… Boudi-ou, faut croire qu’il n’avait pas encore assez léché la poêle… (NDLR : expression occitane : il voulait baiser plus.)

Lucien C., sexologue, gynécologue
Baiser moins ? Cela ne prive pas vraiment les femmes qui en sont « victimes », puisque leur état physiologique les détourne alors du sexe… Enfin, pas toutes, il y en a qui en souffrent et qui ont besoin de jouer les prolongations à coup de DHEA ou d’hormonothérapie…

Danièle D., photographe, artiste-peintre à Biarritz
La DHEA, j’en prends. Les hormones, non, suite à mon cancer. Je ne souffre pas de la solitude mais du manque de sexe, si ! D’ailleurs, ça commence à bien faire... J’suis presque prête à payer un escort boy là… Non je plaisante, l’amour tarifé, ce n’est pas mon truc, et je crois encore que mon charme opère naturellement !  

Lucien C., sexologue, gynécologue
Baiser moins ? Cela ne prive pas vraiment les femmes qui en sont « victimes », puisque leur état physiologique les détourne alors du sexe… Enfin, pas toutes, il y en a qui en souffrent et qui ont besoin de jouer les prolongations à coup de DHEA ou d’hormonothérapie…

Bander plus ?

Marc F., guitariste de jazz, compositeur
J’ai l’sternum, qui s’dégomme / Et l’coccyx, qui s’dévisse / Et la pine, qui s’débine…
A cinquante ans, tu perds tes yeux ; à soixante, tu perds la moitié de ta queue. Tu passes du verre à moutarde au dé à coudre, ainsi va la bite !

Serge D., ancien commandant de police antiterroriste, ténor dans une chorale basque
Leur sexe, leur phallus dont ils étaient si fiers / Avec le temps n’a plus la prestance d’hier / Le temps a pour les femmes des effets bien moins durs…

Jan B., cinéaste belge, écrivain, fondateur du musée du slip
Le temps se raccourcit. Pour moi, j’estime que j’ai encore dix ans à vivre intensément. Dix ans, pas davantage. Je fais mieux l’amour qu’avant,  je suis plus à l’écoute de l’autre. C’est dire que faire l’amour pour moi est devenu plus important que le simple « bander plus ».

Jehan V.-L., gardien de musée, poète 
Je jouis de plus en plus du seul plaisir de contempler la beauté, sachant que la dame, là-bas, je n’aurai pas forcément envie de la pénétrer. Mais la contempler, oui, et la pousser à la plus haute impudeur, encore oui ! (NDLR : Basic instinct ?)

Framboise D.-B., agrégée de lettres, écrivain
Est-ce mon Viagra mental à moi d’avoir besoin de deux « maris » pour « bander plus » ? J’ai besoin de cette réelle double vie pour maintenir mon désir en éveil et peut-être le leur… C’est pourquoi je me garde bien de choisir l’un ou l’autre !

Lucien C., sexologue, gynécologue
L’insuffisance érectile est la principale  source de consultation, suite à un cancer de la prostate, un problème de diabète, de cholestérol, d’hypertension, d’acide urique… L’excitation pour l’homme est à 90% visuelle : mettez-lui un porno, ce qu’on fait en labo quand il vient consulter, et c’est bon : effet mécanique garanti ! Or avec le temps il perd un peu la mémoire, la capacité fantasmatique s’effiloche, les souvenirs visuels engrangés aussi… Chez les femmes, c’est différent ; elles s’aident parfois d’un petit cinéma intérieur, mais qui n’est pas forcément classé X, et qui peut-être résiste mieux au temps…

Charles G., distributeur de cinéma
Fi des tristes couilles et vive la canaille ! Faut travailler les zones érogènes, nom de Dieu ! Pour cela, j’ai mes dominantes, je les préfère aux soumises, c’est politique ! J’aime les Domina, les « Maîtresses ». On s’amuse, il m’arrive de me retrouver à quatre pattes… Des saynètes, des petits jeux avec les expériences et le temps... J’appelle cela « mes compositions »…

Margaret E., attachée d’ambassade
C’est à partir de cinquante-cinq ans que j’ai connu mes meilleurs orgasmes. Jusque là, j’avais plutôt vécu avec des papas voire des papis, pas très allumés au lit, du moins avec moi ! C’est à l’âge mûr que j’ai rencontré mon meilleur partenaire sexuel. Un voluptueux, quand j’étais un peu nunuche côté sexe. C’est pourtant moi qui lui ai dit un jour : « Baisse ton pantalon » et qui ai tiré les rideaux !

Carpe diem

Yves F., ancien député Vert, écrivain multipolaire
N’écoute pas les peine-à-jouir. Ne te laisse pas vieillir, n’obéis jamais !

Yolande G., cuisinière d’école à Vienne
Vis selon tes désirs et ton cœur, ne tiens pas compte de la morale dominante…

Michèle M., journaliste, correctrice, choriste
Cueille le jour, fais ce que tu aimes plus que tout, prends la vie comme elle vient…

Noël G., entarteur, critique littéraire et de cinéma
Tout ce qui est « casse-pompon » dans la vie, – Travail, Famille, Patrie, Santé… – je le zappe, et ça marche ! Le principe de plaisir contre la dictature de Monsieur Réel ! Les passions m’absorbent tellement que je n’ai même pas le temps de penser à mon diabète !


Framboise D.-B., agrégée de lettres, écrivain
Au conseil d’Epicure, j’ajouterais le « fay ce que vouldras ! » de Rabelais et un bon cocktail de     Diderot, des Bijoux indiscrets à Jacques le Fataliste ! Et croyez-moi, il y a longtemps que je suis passée de la théorie à la pratique !

Pascal B., philosophe, essayiste, romancier
Je ne connais personne qui soit heureux de vieillir, personne ! Donc, profitons, dépêchons-nous, car ça va bientôt finir… (NDLR : Tic tac, tic tac, tic)

Leila A., gardienne d’immeuble
Je ne manque jamais mon petit rendez-vous quotidien avec ma Chartreuse ou mon Izarra bien vert, sur fond de Radio Nostalgie !

Fatima C., traductrice, interprète
Le « Inch’ Allah » (si Dieu veut) tu parles, il faut lui donner un bon coup de pouce au « bon dieu » pour que ça marche. Le destin, si tu ne l’aides pas,  un peu beaucoup… 

Chirurgie esthétique

Véronique A., comédienne de théâtre
J’ai  bien envie parfois de lisser quelques rides, de me faire rectifier ici ou là, mais mon amoureux ne veut pas que je touche à la légère asymétrie de mon visage. Il aime mon côté Picasso !

Françoise B., enseignante aux Nations unies, puis traductrice
Aux femmes obsédées par le Botox, j’ai envie de dire : le problème, ce n’est pas vos rides, c’est vous ! Comme l’a dit Nathalie Baye, la pire des rides, c’est l’ennui… 

Nabil T., dermatologue spécialisé cosmétique
Pas trop de coups de bistouri qui démolissent le caractère, dépersonnalisent un  visage ! Je préfère subtilement creuser, meuler, tatouer, retendre, percer, gommer, maquiller, étirer, dérider, éclairer, cicatriser, épiler ou réimplanter, remodeler, embellir pour « combler » mes patientes… Et mes patients d’ailleurs, les hommes sont de plus en plus nombreux à franchir le tabou des instituts de beauté et des consultations esthétiques… 

Dominique P.-D., gynécologue
J’avais un nez que je trouvais moche, qui me prenait la tête ! Jeune, je me le suis fait refaire, et jamais plus je n’ai été obsédée par ce complexe, toute ma vie en a été débloquée, y compris l’amoureuse !

Anne P., taxi woman
J’ai fait un lifting pour enlever à mon visage son voile de tristesse. La tristesse demeure, mais je ne la regarde plus pareil…

Hélène D., veuve d’un humoriste ravageur, productrice
Le lifting, je l’ai fait à quarante-huit ans — huit ans après la mort de Pierre — pour me reséduire en fait, pour que ma gueule soit « raccord » avec l’intérieur.  J’avais perdu dix kilos, les traits de mon visage s’étaient détendus. C’était le masque de la vie subie…   

Roland L., cinéaste belge expérimental
Le regard à la Maurice Béjart ? On me l’a déjà dit. Mais ces paupières qui tombent, dites « donjuanes », j’ai très envie de me les faire relever… Ça fait triste non, qu’est-ce que t’en dis ?
(NDLR : Triste ou torride, l’érotisme de la paupière qui tombe chez Charlotte Rampling ?)  

Fatima C., traductrice, interprète
Le visage après l’amour ! La peau s’éclaire, les yeux pétillent, les lèvres redeviennent pulpeuses, les traits rajeunissent : quel lifting rendra jamais cela ?

Désir

Maxime L., chanteur-compositeur célèbre
Le désir, c’est comme les marées, il y a les hautes, il y a les basses… Désormais, je les aime bien toutes… Dans la musique aussi, j’aime le silence entre les notes…

Britt Nini, documentaliste et critique de cinéma
On a beau saluer les « privilèges de l’âge », vieillir, c’est une blessure narcissique, surtout quand on a si bien connu comme moi le harcèlement sexuel ! Tu veux éviter d’être vue à poil, forcément, le sexe y perd des possibles… Où il est, le privilège, là, tu veux me dire ?

Catherine B., conseillère culturelle
Côté libido, avoir mûri me va très bien, c’est même mieux qu’avant ! Je n’ai jamais éprouvé autant de pulsions et de désirs ! En attendant le prochain chéri, qui tarde à venir, Jack le Rabbit, mon vibrant petit sextoy, fait du beau travail : il stimule le clitoris et le vagin, à vitesse réglable, en silence. C’est  pas super, ça ? 

Françoise B., enseignante aux Nations unies, puis traductrice
Fini la dictature des hormones ! Nous sommes moins sollicitées, c’est un fait, mais les demandes s’ajustent à l’offre… Pourquoi donc en faire tout un drame ?

Betsy C., kinésithérapeute, ostéopathe
Il suffit souvent d’un nouveau désir pour réveiller le tout, en particulier la lubrification. Preuve que celle-ci n’est pas liée aux ovaires, mais au désir !

Fatima C., traductrice, interprète
Je crois sincèrement au feu permanent, aux braises sous la cendre. Mais il ne faut pas laisser s’accumuler les réserves de bois à la cave !

Lucien C., gynécologue, sexologue
On revient de vacances, et puis on se retrouve devant des sexes toute la journée. On pense des fois qu’on fait un métier bizarre. Pour la libido, c’est pas bon quoi, ça vous la casse !

Britt Nini, documentaliste et critique de cinéma
Selon les sexologues, la lubrification du vagin ne serait pas hormonale, mais sexuelle, assez   parallèle à l’érection masculine.  Conclusion : même avec zéro hormones, tu lubrifies !

Idéologie

Pascal B., philosophe, essayiste, romancier 
L’amour relève de la scène privée. C’est dans les états totalitaires que la politique s’empare de l’amour…  La libération sexuelle portait en elle un dogme très culpabilisant… Aujourd’hui, j’insiste, il faut se libérer de la libération !    

Marianne S., one woman show borderline
Entre les idées et le vécu, il y a des gouffres. Les belles idées révolutionnaires d’un côté, des attitudes de femme soumise de l’autre… Le hic,  c’est que je suis encore en plein dedans ! Mais ça va changer, il le faut nom d’une pipe !

Lucien C., gynécologue et sexologue
Le sperme ne peut tout de même pas être complètement dévalué, hein ? Maintenant, on est d’accord,  il ne sert à rien au niveau de la jouissance. Le plus souvent il finit dans une capote à la poubelle… (NDLR : Triste destin pour la valeur boursière de la reproduction de l’espèce !)

Annie-Claire M., monteuse de films
Dabs les années 70, avoir trois amants en trois jours n’avait rien de déraisonnable ! Pourquoi je couchais sans en avoir toujours envie ? Hum… par crainte du conflit sans doute, par peur de dire non, par paresse, par lâcheté, par politesse aussi, on n’avait pas trop le choix, ça faisait partie de l’accueil ! Et puis c’est trop compliqué de dire non à un mec je trouve… Remarque, maintenant, je suis moins polie !

Françoise B., enseignante aux Nations unies, traductrice
Fini le terrorisme sexuel des années 70 et les procès révolutionnaires jusque dans nos lits ! On n’a plus peur de se faire traiter de « frigide » ou de « petite bourgeoise coincée ». On ne couche plus avec des idées, même les plus « radicales » ! (NDLR : Exit le terrorisme de l’oreiller !)

Jalousie

Jan B.,  cinéaste belge, fondateur du musée du slip
Le mâle et la femelle sont naturellement jaloux, il y a des terrains avec des limites. Voilà, c’est comme ça, il suffit d’observer la nature… Jaloux, c’était mal vu en 68. Mais la nature, ce n’est pas l’idéologie. Or nous, on a été baisés par l’idéologie !

Sylvie V.-H.,  éditrice, puis correctrice et relieuse 
Quand j’ai compris que ce n’était pas parce qu’il mettait sa zigounette dans le pilou-pilou de l’autre qu’il ne m’aimait pas, j’ai pensé que si c’était ça, la jalousie, c’était quand même un peu débile ! (Rires)

Gérard P., directeur d’entreprise, puis consultant
Jaloux je suis, jaloux je suis toujours, mais de plus en plus tendrement.

Michèle M.,  journaliste,  correctrice, choriste
Le « moi jaloux jamais ! » des soixante-huitards, quel bobard ! Bidon tout ça ! J’ai toujours souffert de la jalousie, même – et surtout ? – à cette époque où les occasions d’être jaloux surgissaient de partout !

Fatima C., traductrice, interprète
Dans la jalousie, est-ce que ce n’est pas soi qu’on aime, au fond, plus que l’autre ?

Yolande G., cuisinière d’école à Vienne
La jalousie ! Qu’est-ce que j’en ai souffert, tout compte fait, sans jamais l’avouer, même pas à moi-même. Sacripant de Le Gloupier (alias l’entarteur Noël Godin), je l’aurais bien entarté à l’époque !...  Au fil des années, j’ai appris à balayer un tas d’appréhensions. Mon Martin aujourd’hui ne me donne plus d’occasions d’être jalouse, je vis beaucoup plus sereinement et ça me va !

Jehan V.-L., gardien de musée, poète 
J’ai rencontré un vrai jaloux, un jour, dans un bistrot. On m’avait prévenu : ne déconne pas, ne regarde surtout pas sa femme, c’est un « jaloux », un morbide ! Le pauvre mec était constamment aux aguets, mal dans sa peau, avec lui, avec les autres. Le jaloux va jusqu’au meurtre, c’est un assassin en puissance !

Betsy C., kinésithérapeute, ostéopathe
La jalousie touche à la peur de l’abandon, au manque de confiance en soi, à des fragilités issues de l’enfance, souvent. Une  maladie, des nœuds gordiens à dénouer sans cesse, à coups de pouces,  pressions hypodermiques, massages intelligents, onguents, points d’énergie à débloquer…

Britt Nini, documentaliste et critique de cinéma
On dit « plus on aime plus on est jaloux ». Mais la jalousie, pour moi, est à l’opposé de l’amour ! Jusqu’aux parents qui jouissent d’exciter la jalousie entre leurs enfants… Et puis la Société prend le relais… C’est ainsi que des adultes bien conditionnés par le logiciel capitaliste cherchent encore à avoir la meilleure part du gâteau. Des jaloux, ou des arriérés mentaux ?

Henri S., paysagiste
J’ai souvent la nostalgie de « l’état de jalousie » que je ressentais quand j’étais dans la passion. A présent, je ne l’éprouve plus et il m’arrive de regretter l’intensité de la jalousie, comme on regrette un tourment délicieux, une torture terrible et magnifique, la sensation d’être menacé mais intensément vivant…

Brigitte B., ancienne informaticienne, puis stagiaire chez un grand chef pâtissier
Un couple jaloux sent le renfermé, le moisi. La jalousie est partout et elle est pernicieuse. Elle assombrit le paysage, sape tout, détruit tout, étouffe le couple et le partage. Elle va avec la compétition, ferme au plaisir, au ludique. Il faudrait plus de curiosité, d’amour pour l’autre que de jalousie…

Jeunesse

Jacques C., mathématicien-musicien, ténor précaire
Je cherche à nier le temps. Le temps est lisse. Il faut jouir comme si on était éternel !  

Britt Nini, documentaliste et critique de cinéma
Quand on s’entend bien avec quelqu’un sur le plan cul, on se sent jeune, on EST jeune !

Edwidge T., assistante sociale 
Quel âge a-t-il ? Je m’en tape, il ne me demande pas le mien, il se fait plaisir, il me fait plaisir…

Fatima C., traductrice, interprète 
J’ai tour à tour tous les âges et plus souvent trente ans que soixante !

Françoise B., enseignante aux Nations unies, puis traductrice
Un peu d’âge aide bien, jusqu’à être, parfois, un incontestable avantage… Il ne faut pas croire, les mecs ne sont pas attirés que par les minettes ; ils aiment aussi les femmes d’expérience, qui ont une vraie histoire sensuelle et qui savent l’importance du corps…

Jehan V.-L., gardien de musée, poète     
Aujourd’hui, les femmes de soixante ans sont magnifiques, le regard sur elles a complètement changé !

Myriam G., menuisière, traductrice
J’ai longtemps cru que rien ne pouvait plus m’arriver à partir d’un certain âge ; mais plus j’ai vieilli, plus ce « certain âge » a reculé ! 

Serge D.,  commandant de police antiterroriste,  ténor 
A l’âge mûr, une femme connaît son corps mieux qu’une jeunette, tu peux lui faire un plaisir immense rien qu’en la caressant… 

Betsy C., kinésithérapeute, ostéopathe
Les cougars, un phénomène nouveau ? Lié à pipolisation et à la chirurgie esthétique,  il a tendance à agacer, voire horripiler. En même temps, pourquoi laisser aux seuls mâles le plaisir de la chair fraîche ? Après le tandem barbon/tendron, place au  duo cougard/chiard ! (NDLR : Il n’est jamais trop tard !)

Yolande G., cuisinière d’école à Vienne
Pour moi, tout dépend de la chimie. Si elle correspond à la mienne, je me réjouis, sinon je m’enfuis. On nous parle de retraite, mais l’amour et le désir n’ont pas envie de prendre la retraite, on désire sans fin. On nous parle d’âge mûr, mais c’est quel âge, l’âge mûr ?

Anne P., taxi woman
Je suis une enfant adulte. J’ai tout le temps devant moi, si bien que j’ai l’impression que je n’ai encore rien commencé. Plus que jamais,  champ des possibles est ouvert !

Patrice C., contrebassiste, compositeur
Le cap des 60, cela m’a fait quelque chose, bien sûr. C’est une sacrée barre de mesure sur la partition de la vie. Mais le sentiment d’être dans les scansions d’une continuité est plus fort que l’angoisse de vieillir.

Jouissances, plaisir de vivre

Pascal B., philosophe, essayiste, romancier
La vie amoureuse n’est pas dans le « jouir sans entraves », elle est dans l’obstacle, le retard, l’attente. Elle est quelquefois dans le délai. Maintenant, c’est Michel Onfray qui nous bassine avec ses théories : un commissaire politique du plaisir ! Le plaisir, chez lui, c’est un ordre !... Il y a une manière non jouissive de parler de la jouissance… Or le discours sur la jouissance, au fond, on s’en fout, c’est de l’abstraction pure. Ce sont les êtres que l’on rencontre qui sont merveilleux, non pas la jouissance en soi.

Françoise B., enseignante aux Nations unies, puis traductrice free lance
Je décide moi-même des mille et une manières de jouir de la vie ! Plus vieux, on jouit autant, mais autrement, voilà tout.  Avec plus de conscience et d’acuité, souvent…

Lucien C., sexologue, gynécologue
Chacun a ses mots pour y accéder, le plaisir sexuel est comparable au langage. Et pour ce qui est de l’orgasme, ben, c’est court ! (NDLR : Oups ! Pourquoi donc en fait-on tout un fromage ?)

Pascal B., philosophe, essayiste, romancier
Il y a aussi la simple joie de l’approbation de l’existence telle quelle, avec ses bons et ses mauvais côtés… Et le plaisir n’est pas forcément sexuel… N’y a-t-il pas aussi une jouissance du chaste, de l’ascète ?

Hélène D., veuve d’un humoriste ravageur, productrice
Bien plus que la ménopause, n’est-ce pas le manque de plaisir qui provoque le vieillissement ?

Betsy C., kinésithérapeute, ostéopathe
Je flambe un peu pour quelqu’un en ce moment. L’autre jour dans le métro, rien qu’à fantasmer, à repenser à son regard félin au moment clé, hop, l’incendie, le tour complet ! Mais oui l’orgasme en douce, toute seule, comme à vingt ans !

Britt Nini, documentaliste de cinéma et critique
Jeune, tu surfes sur tes hormones, tu jouis d’à peine trois de tes orifices, alors que nous en avons plus de dix ! Aujourd’hui nous en pratiquons une bonne partie !

Catherine B., conseillère culturelle
Que faire de ces hormones qui se réveillent, de ces pulsions inopinées ? Eh bien, je m’entretiens, je me masturbe quasiment tous les jours par exemple, cela décuple les endomorphines !

Myriam G., menuisière, traductrice
Il me suffit de vivre pour être heureuse… Plus je vieillis, plus je savoure le présent dans ses mille et un petits plaisirs.

Serge D., commandant de police antiterroriste, ténor
La Carte du Tendre Senior n’a rien à voir avec la performance, mais avec l’amour, le désir partagé.  Une femme aujourd’hui me dirait « fournis tes preuves », ça me ferait débander, alors qu’autrefois j’aurais fait sortir le serpent du panier !

Edlin O., reporter télé, puis « cheikha » soufie à Mexico
La jouissance amoureuse restitue l’état d’enfance, rallume la volonté de vivre, embellit tous les êtres. Chaque rencontre est une résurrection, una vida nueva,  une vie sans cesse recommencée…

Dominique R., photoreporter(e)
C’est grave la ménopause, mais à 60 ans, elle est derrière.  Terminé, c’est reparti comme en quarante ! Ma soixantaine est bien plus heureuse que ne l’a été ma cinquantaine, sexuellement parlant… Car ça revient la libido, oui, tout revient, j’affirme : la capacité à fantasmer, à désirer, à jouir, le droit à faire des conneries !

Passion

Charles G, distributeur de cinéma
La passion, pour moi, c’était sortir du cadre, aller au-delà des limites des désirs les plus extrêmes, et y aller de concert avec l’ aimée…

Sylvie P., libraire spécialisée 
La passion amoureuse, c’est l’exclusivité, ça détruit, ça rend con, ça rend flic ; ça rend capable de faire des trucs contraires à sa propre morale.  Non à la passion, j’ai horreur de la passion, je suis contre ! Mais oui à l’amour et à ses coups de foudre : de complicité, de partage, de camaraderie amoureuse…  

Jehan V.-L., gardien de musée, poète
La passion ? Oh, que non ! Mais oui à la camaraderie amoureuse et à la tendresse. Je renie la passion, mais pas la tendresse. D’ailleurs l’une dure, l’autre pas…

Fatima C., traductrice, interprète
C’est bien plus dangereux pour le couple de refouler une passion extérieure que de la vivre. Mais pour cela, il faut beaucoup de confiance, en soi, en l’autre…

Britt Nini, documentaliste de cinéma et critique
Moi qui étais si grave dans la passion, depuis que Patrice est mort –qu’est-ce qu’on a ri ensemble ! – le rire est devenu l’antidote de la douleur et le rire, partagé avec des êtres chers, le baume indispensable au désir de vivre…

Betsy C., kinésithérapeute, ostéopathe
Hou la, dangereuse, la passion ! Une sorte d’explosif ! Du jour au lendemain, tu peux devenir un parfait connard, une débile profonde, comme sous l’emprise d’une dictature, qui pulvérise toute pensée critique et ludique. Ta meilleure amie peut s’avérer la pire des dragonnes, tu ne la reconnais plus ! Tu ne te reconnais plus non plus, quand ça t’arrive à toi. Un sacré coup de bambou sur l’intelligence !

Michèle M., journaliste, correctrice, choriste
Je renie la passion, mais pas la tendresse. La tendresse à qui j’accorde à présent énormément de place ! Toute la place ! 

Maxime L., chanteur-compositeur célèbre
Je ne crois pas que nous soyons davantage protégés des états passionnels vers la soixantaine… Il y a d’ailleurs des passions dévastatrices… Jeune, la passion, c’est magnifique, un peu comme la folie ; mais à 60 ans, celui qui quitte sa femme pour une passion, le jour où il se réveille, « ça craint »…

Nina N, généalogiste
Est-ce que l’on devient moins dépendants des passions, des emportements, avec l’âge et l’expérience ? Pas si sûr… On n’en risque pas moins l’implosion ! Enfin, il y a les passions qui aveuglent et celles qui éclairent, vous rendent plus lucides, sur la vie et sur vous-même…

Peur, doute, refus de souffrir

Fatéma H., restauratrice, ethnologue
Moi, ce que j’ai toujours craint, c’est la peur de ne pas plaire, mais elle me paralyse de moins en moins, car je suis de mieux en mieux dans ma peau… Un privilège de l’âge !

Lucien C., sexologue, gynécologue
Rien n’est là pour faire l’amour, bizarrement… Le système nerveux autonome, indépendant de la volonté, ne favorise pas le sexe, au contraire, il coupe les vannes,  toujours là pour empêcher, bloquer. Il ne lâche le frein que si s’installe un climat de sécurité et de confiance, si les conditions sont favorables à l’amour… Par exemple, les femmes qui font des mycoses à répétition avouent souvent une crainte de faire l’amour…

Anne P., taxi woman
Quand tu as, comme moi, une belle névrose, — merci Maman ! — tu n’es pas à égalité avec les autres,  tu appréhendes les bons plans, tu sabotes tes propres chances amoureuses. 

Roland L., cinéaste belge expérimental
Faire la cour aux jeunes filles, ce n’est pas la conscience de mon âge qui m’en détourne — j’ai toujours quatorze ans dans ma tête — c’est la peur d’être pris pour un vieux libidineux !

Fatima C., traductrice, interprète
Plus tard, cette histoire de peur prend de l’importance. Le temps aidant, on devient moins audacieux, plus timoré. On navigue entre l’assurance et le doute. Avant de conquérir l’être aimé, ce qu’il faut reconquérir, c’est d’abord la confiance en soi, dans son propre corps. Il faut se le réapproprier pour pouvoir le redonner…

Hélène D., veuve d’un humoriste ravageur, productrice 
Je n’aime pas morfler, je n’ai aucun respect pour la souffrance, je m’emmerde dans le malheur !

Pascal B., philosophe, essayiste, romancier
La souffrance amoureuse ? Qui ne l’a vécue ? Mais je déteste ça, j’efface, mon disque dur raye tout seul…  

Marianne S., one-woman-show borderline
Désormais, si je rencontre un homme marié, je me casse vite fait bien fait de peur d’en tomber amoureuse. Pas question de faire vivre à une femme ce que je viens de vivre ! Solidarité féminine oblige !

Pia C., metteuse en page indépendante, maquettiste
Bien sûr que j’aimerais retomber amoureuse, mon handicap n’a d’ailleurs rien empêché, mais il s’aggrave avec le temps… Or si tu t’installes dans la plainte, si tu te poses en victime, tu ne t’en sors pas, tu crèves, c’est l’ennemi qui gagne. « Jamais victime », c’est ma devise !

Séduction

Marianne S., one-woman-show borderline
Séduire, c’est repousser l’âge. Tant que tu es jeune, pour la séduction, tu es une proie. Moins jeune, tu aimerais bien le rester !... Le hic, c’est que quand tu es très amoureuse, tu deviens tellement conne que tu es prête à tout pour séduire ou reséduire. J’aurais changé les seins, moi, par exemple, si j’avais été sûre que ça allait faire revenir mon mari. Et pourtant, je dors à plat ventre ! (NDLR : Il n’est pas revenu, autant laisser tomber les seins !)

Marc F., guitariste de jazz, compositeur
Mais quel dommage ! Elles sont tellement plus jolies avec leurs rides ! C’est comme les vins de garde, quoi, faut garder sa tronche maintenant ! Moi par exemple, jeune, je me trouvais laid ; maintenant, je trouve mon visage «intéressant».

Michèle M., journaliste, correctrice, choriste
Un homme mûrit, une femme vieillit ? Pur cliché, ridicule, le genre de préjugé à dégommer fissa ! Tous nous mûrissons et tous nous vieillissons !  Rien ne sert de vouloir séduire, il faut mûrir à point !

Yves F., ancien député vert, écrivain multipolaire
Quand je ne séduis plus, je suis mort… Je n’ai pas besoin de me séduire, je sais qui je suis et je m’aime beaucoup. Encore qu’avec le temps, ça se dégrade… Quand j’entre dans une pièce où il y a un chat et trente personnes, je commence par le regarder dans les yeux. Dans les cinq minutes, il est sur mes genoux ; ça, c’est de la séduction au sens le plus large du terme. Les chats aiment qu’on les préfère et vont spontanément vers qui les aime. J’aime bien les femmes-chats mais elles sont rares…  Je m’interroge de plus en plus sur ma stratégie de charme. Je ne couche pratiquement plus jamais le premier soir… Et pas question de prendre un râteau ! (NDLR : un coup de griffe à la rigueur ?)

Anne-Lise V., sculpteure, retraitée des Nations unies à New York
Dans les sites de rencontres du Net, pour séduire, les Américains se sentent obligés de dire « I love sex », alors que chez les Français, ça va de soi !  Les Américains se présentent debout, tout droit, en bermuda, entourés d’enfants, cherchant à faire ressortir leurs qualités morales. Ils mentionnent leur poids, leur taille, leur religion, leur degré d’alcoolémie, leur taux de nicotine… Les Français sont plus « fleur bleue », parlent de sentiments, envoient des photos où on les voit radieux au Taj Mahal sur fond de paysages fleuris…

Marie-Claire M., photographe féministe à New York
La cyberséduction, c’est le voyage dans des fantasmes à même de se concrétiser… Il existe une nouvelle race de femmes avec le Net. Elles rencontrent des hommes qu’elles dominent par le Verbe. Le Verbe, c’est l’hameçonnage version nouvelle technologie… Les Domina du Verbe ont supplanté celles du Fouet ! A nous l’ouverture de la pêche !





Britt Nini, documentaliste et critique de cinéma
Le relooking au masculin ? Ouverte la chasse au poil jusqu’au pubis, soupçonnable le cheveu long jusqu’à la boule à zéro, proscrite toute odeur naturelle… Tyrannisés, masochistes ? Pauvres garçons, on ne leur en demande pas tant ! S’ils savaient à quel point la séduction se passe de tous ces masques…

Salma B., mystique, soufie, séductrice à l’infini…
A chaque prière, chaque jour, je me fais belle, me parfume à l’encens, me prépare longuement au cas où Il  (Dieu en personne,  sic !) m’appellerait à Lui…

Jehan V.-L., gardien de musée, poète 
La séduction est intemporelle… Elle rythme les jours, capte les chances d’être… L’autoséduction ? J’assume le terme de « dandy », mais pas celui de narcisse. Je me dois d’être à la hauteur de l’élégance des femmes…

Gilles P., critique gastronomique, journaliste
Séduire, c’est plaire, être, paraître, raconter. C’est toujours important. C’est le sel ou l’essence même de la vie ! 

Dominique R., photoreporter(e)  
La séduction est une joute consentie, un jeu d’autant plus merveilleux que les parties jouent à égalité. Les femmes de soixante ans de nos jours sont plus vivantes et séduisantes que jamais ! On n’est plus au temps de Balzac où la femme de trente ans était jugée vieille ! Je dirais même qu’il y a une « séduction de l’âge » qui a le vent en poupe.  Mais oui, une « aura sexa »…

Pierre A., comédien de premier plan
Je ne suis pas un séducteur, car je m’attache ! J’ai détesté jouer Don Juan, par exemple, il y a vingt ans… Etre séduit, c’est plus important que séduire… De toute façon, la première personne que j’ai besoin de séduire, c’est moi ! Ce qui m’importe c’est d’essayer d’être moi, de m’atteindre enfin… Alors est-ce que c’est ça, vieillir ?  

Maxime L., chanteur-compositeur célèbre
Je n’ai  pas envie de séduire si  je n’entends pas un écho dans la musique du désir, si je ne ressens pas la réciprocité amoureuse… 

Françoise B., enseignante aux Nations unies, puis traductrice
Enfin libres ! L’âge nous libère de l’obligation de séduire ! Plus jeunes, nous n’osions pas, nous voulions trop plaire aux hommes !  Mais à tout âge, l’envie de séduire demeure !  « On ne sait jamais », disait ma tante Joséphine à plus de quatre-vingts ans, en se mettant chaque soir une touche de parfum derrière l’oreille…

Sexualité

Denis L., avocat militant anarchiste, écrivain
Investissons les zones révolutionnaires, mais n’oublions pas les zones érogènes ! (NDLR : Paroles, Paroles, Paroles ?!)

Pierre A., comédien de premier plan
Sexa, mais pas cacochyme ! J’ai encore le temps, non ?

Serge D., policier antiterroriste, ténor
On commence par la caresse, on s’abandonne, on fait confiance, on reprend confiance, on bande, on mouille… Comme l’a écrit récemment Philippe Delerm, « et on veut de cette mouillure-là »… 

Pascal B., philosophe, essayiste, romancier
Nous ne sommes plus des prédateurs. Nous n’avons plus envie d’être des proies…



Marianne S., one-woman-show borderline
Plus jeunes, cela nous énervait souvent d’être des proies. Plus vieilles, on aimerait bien le rester ! … Il y a des choses qui changent… Mate le phénomène des cougars, par exemple : Claire Chazal et son jeunot dans Paris-Match, Catherine Deneuve en couverture de Têtu, habillée chic en position sodomite derrière un jeunot à poil ! Cela ne choque plus personne, au contraire, sa légendaire froideur y gagne un galon !  

Jehan V.-L., gardien de musée, poète
Il y a sûrement un lien qui perdure entre le vit, le cœur et la tête…

Betsy C., kinésithérapeute, ostéopathe
Selon un ami sexologue, les hommes seraient obsédés par l’insuffisance érectile qui les saisit ou qui les guette, en quête de leur état antérieur, en soi, dans l’absolu, sans envisager pour autant une relation sexuelle précise. Tandis que la baisse de la libido inquièterait moins les femmes que l’indifférence de leur partenaire. La libido féminine serait toujours liée à une relation amoureuse présente ou à venir. Est-ce si sûr ? N’avons-nous pas quant à nous la nostalgie de la Nature, de sa généreuse chimie, de la lubrification sexuelle ou de la « bandaison » sans objet ?

Françoise B., enseignante aux Nations unies, puis traductrice
Le simple désir de danser est devenu pour moi tout aussi sensuel et excitant que le désir charnel. Quel luxe, enfin, de s’offrir des plages d’inactivité sexuelle décomplexées et joyeuses et de n’en concevoir nulle angoisse ! Cela n’exclut pas une nuit folle, ça et là !

Dominique R., photoreporter(e)
Je déteste la sexualité du « besoin », du « manque », des mots qui, à mes yeux, relèvent de la vulgarité et du consumérisme sexuel. 

Aravni M., régisseuse, puis assistante sociale
Enfin écoute, le sexe, ça va, ça vient, ça ne vient pas, ce n’est pas grave…

Myriam G., menuisière, traductrice 
Prendre de l’âge, c’est peut-être prendre de l’altitude, regarder de haut et de loin sa vie amoureuse et sexuelle…

Britt Nini, documentaliste, critique de cinéma
Les règles ! Le sang des vampires ! Le ressenti des caresses, faire l’amour « dans mes époques », « quand les Anglais débarquaient inopinément » — en rouge ! — c’était diabolique ! Après, tu inventes d’autres scénarios, tout aussi chouettes, même si, hélas, les vampires sont partis…

Yolande G., cuisinière d’école à Vienne
Avant ma rencontre avec Martin, sans être pour autant désemparée comme tant de femmes qui pensent qu’elles ne valent plus rien sur le marché, je n’avais plus de vie sexuelle… Aujourd’hui, c’est la Renaissance !

Sylvie V.-H.,  éditrice, puis correctrice, relieuse
Je n’ai jamais aussi bien joui que depuis la ménopause ! Les règles me déréglaient !

Hélène D., veuve d’un humoriste ravageur, productrice 
La libido, c’est comme le vélo, et tellement plus rigolo que la peinture à l’eau. Si tu arrêtes trop longtemps, tu te casses peut-être un peu la gueule au début, mais très vite, tu peux faire du VTT ! 

Utopie

Betsy C., kinésithérapeuthe, ostéopathe
Oui, on demeure utopique, on veut toujours l’impossible ! Et tout ce qui est possible se consume…



Framboise D.-B., agrégée de lettres, écrivain 
La liberté amoureuse, ça fait partie de l’utopie. Moi, je la vis ! J’ai tout en double dans ma vie : deux maris, deux maisons, un chat dans l’une, un oiseau dans l’autre, le tout à Paris et moi entre les deux… Trente ans après, je ne peux toujours pas choisir, car je sais que si je renonçais à l’un, je perdrais l’autre et je ne serais plus leur objet de désir…

Fatima C., traductrice-interprète  
Le couple parfaitement monogame est pour moi une utopie. Se poser comme l’unique, l’indispensable pour quelqu’un sur toute une vie, quelle arrogance !  

Lucien C., sexologue, gynécologue
Si les femmes mouillaient en permanence, si les mecs étaient en constante érection : une utopie sexuelle ? Oh que non, ce serait carrément dangereux pour l’espèce, un danger total, on ne pourrait rien faire d’autre. Le rut permanent et collectif relèverait plutôt du cauchemar ! (NDLR : quel beau sujet de fiction !)

Yolande G., cuisinière d’école à Vienne
Aujourd’hui, je m’accepte telle que je suis, je n’y vois même plus le signe d’une « violation des droits révolutionnaires ! »  Bien sûr, j’aurais aimé croire en des rapports amoureux multiples, au « Nouveau monde amoureux » de Charles Fourier, à l’épanouissement de tous les participants, mais je suis convaincue désormais que cela relève de l’utopie, une utopie bigrement tentante mais… Je ne crois plus à l’utopie de la non-jalousie, mais je crois toujours à celle de la « transparence » dans le couple. Quelles qu’en soient les conséquences, je suis encore et toujours pour la confiance, la sincérité, la vérité absolue !... Je ne crois plus au Grand Soir, mais je crois plus que jamais à la force de nos désirs et aux plaisirs que l’on s’octroie…  

Pascal B., philosophe, essayiste, romancier
La liberté amoureuse ne rend pas l’amour plus léger, elle le rend plus compliqué ! Pure utopie que le culte de la transparence en amour !… Il faut savoir défendre le secret, résister à l’injonction de vérité, à cette sommation du « tout dire » si à la mode dans les années 70…

Noël G.,  entarteur, critique littéraire et de cinéma
Tout se dire, la « transparence ? Je suis toujours pour, ma complice aussi. Rien n’a changé dans notre pacte. La trahison, pour nous, n’est pas de désirer, d’aimer ailleurs, mais le mensonge, par omission surtout, sa seule idée nous fait horreur ! 

Maxime L., chanteur-compositeur
Se sentir obligé de « tout dire » dans son couple ? Hum… on frôle vite l’Inquisition… Il y a des moments, des âges où l’on peut tout entendre et d’autres pas, où l’on est plus  fragile…

Volonté d’aimer

Framboise D.-B., agrégée de lettres, écrivain
Il faut déjà s’aimer soi-même pour aimer les autres… « Si on compte sur les autres pour vous aimer à votre place, sur la durée, c’est invivable », des mots d’Isabelle Adjani, récemment, dans un magazine…

Betsy C., kinésithérapeute, ostéopathe
La passion passe, mais la tendresse est constante !

Edlin O., reporter télé, puis « cheikha » soufie à Mexico
La vie est d’autant plus belle que la conscience du temps qui passe s’intensifie. Je sais que tout vient de moi, de ma volonté d’aimer, de me laisser aimer. Cette seule volonté me rend invincible. « Z’à la vie z’à la mort », comme le disaient les murs en 68,  et, avant, les pactes d’enfant !

Julien S., gay retraité, brocanteur, guide au cimetière du Père Lachaise
Beaucoup d’homos mecs pensent qu’au-delà de quarante ans, leur ticket n’est plus valable ! Des critères d’âge, d’apparence, d’esthétique…nuls quoi, des préjugés, des idées reçues… Mais moi, voyez-vous, j’ai bientôt 70 ans et comme je ne cautionne aucun de ces critères, je suis retombé amoureux ! (NDLR : pourquoi dit-on retomber amoureux alors que tout remonte ?)

Sylvie V.-H., éditrice, correctrice, relieuse
Il ne faut pas oublier que c’est moi qui vis avec lui (Noël Godin l’entarteur, sic)… Les autres passent, trépassent, mais moi, je l’ai au quotidien ! C’est mon homme quoi, et il me touche toujours aussi profondément… Tiens le voilà qui arrive, regarde comme il marche, cette poésie dans l’espace, je ne m’en lasse pas…

Mimi M., assistante dentaire, femme au foyer, puis femme divorcée
L’amour advient tant qu’on a l’intention de l’accueillir pardi !… Et un bel Egyptien à défricher, à « décrypeter », dans ma Montagne noire, ça me dirait bien, heinnng ? Pas besoin de s’appeler « Madame Champollion » !

Betsy C., kinésithérapeute, ostéopathe
« Tout homme est fils de son expérience », a dit Montaigne. Ceci dit, l’expérience ne sert à rien en amour puisque nous sommes prêts à refaire les mêmes bêtises en son nom et à tout âge !

Françoise B., enseignante aux Nations unies, puis traductrice
Nul doute que le parfum de jasmin n’est pas le même quand on le respire à 20 ou à 60 ans. Car chaque instant vécu à soixante ans est plein, plein de tous les instants vécus avant. Quel luxe, quelle richesse !

Marianne S., one woman show borderline
Je sais que je suis encore dans le mythe « fleur bleue », mais rien à faire, je veux toujours rêver ! Les immortelles, c’est le nom d’une fleur, non ? Bleue ? Hi, hi !... Bon je rame, je bagarre encore aujourd’hui pour y arriver à cette « insoutenable légèreté de l’être » en amour, cette désinvolture tranquille qu’aiment tant les mecs ! (NDLR : elle se met à danser : I want to be loved by you, nobody else but youpou-pou-pi-dou !)


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Alors ? Prêts pour une sexy sexa « vita nova » ?

L’entrée dans la nouvelle vie qu’est la maturité demande de l’imagination et une vigilance constante ; tout un travail de conscience et de lucidité, d’humour et de foi dans la vie qui se peaufine très en amont… Changer le regard que la société porte sur l’âge mûr, désamorcer les pièges sournois qu’elle tend à l’existence, relever le défi du destin à l’aube de leur « nouvelle vie », les sexas s’y emploient et vont inventer bien d’autres choses encore.
Conscients de leurs avantages, — progrès de la médecine, avancées technologiques — qu’ils manient souvent avec brio, comme délivrés de l’Histoire, ils tracent toujours de nouveaux chemins vers un « quatrième âge » — voire un cinquième, pourquoi pas ?— égayé de leurs utopies, projets et folies jamais éteintes… 
Leurs révélations fourmillent de mille tours, astuces, recettes, lesquelles, par touches successives, débouchent sur une forme d’acquiescement à l’existence qui n’a rien d’une résignation. Bien au contraire, ils mènent leur barque au milieu des récifs en les affrontant résolument, allumant ça et là des petites lueurs qui ne peuvent qu’éclairer notre propre navigation. J’ai été séduite par la pertinence, la densité, la tendresse, l’intelligence, la drôlerie et la poésie de la plupart d’entre eux…
Portes grandes ouvertes, donc, à une présence à la vie qui transcende les affres du temps et les préjugés sur l’âge encore vivaces ! Voilà l’état d’esprit positif et optimiste dans lequel m’a laissée cette enquête. Ils réveillent tout et ils nous réveillent, merci à eux !
Par ici la sortie des idéologies, bienvenue à la sensualité amoureuse de LA SEXY SEXA VITA NOVA !    


Lisbeth Rocher